Martel en tete

18Fév/16Off

Bientôt les droits de douane ?

Notre pays compte son lot d'aberrations, mais il en est une qui me hérisse un peu plus que les autres : les droits de douane. La manière dont l'Etat réfrène ainsi l'économie de notre pays, tout en croyant (ou prétendant) bien faire, m'a toujours crispé. Mercredi dernier, j'ai même pu en discuter avec plusieurs interlocuteurs étrangers, à l'occasion d'un meeting à Paris. Et ce qui est clairement ressorti de la discussion, c'est que nos droits de douane français sont vraiment une aberration. A la base, ils nous viennent des industriels français en perte de vitesse, qui font pression sur nos politiques pour qu'ils soient instaurés. Selon eux, les tarifs de douane sont en effet indispensables pour les soutenir face à une main-d‘œuvre étrangère trop concurrentielle. D'une part, c'est justement là l'objectif principal du commerce mondial : exploiter les inégalités internationales dans les prix portant sur des biens de consommation pour permettre à tout un chacun de bénéficier des meilleurs prix. D'autre part, il faut bien comprendre que cette perte concurrentielle fait partie d'un processus naturel. En effet, une nouvelle technologie apporte à un pays un avantage compétitif sur des produits particuliers. Celui-ci est, bien sûr, éphémère. Avec le temps, d’autres pays s'engouffrent dans cette technologie, la maîtrisent, et la proposent donc à moindre coût de manière à remporter l’avantage comparatif. Les entrepreneurs français, qui ne bénéficient alors plus de cet avantage comparatif, déplorent cette concurrence impossible à battre, parce qu'elle est produite par une main-d’œuvre étrangère bon marché. Ils feraient pourtant mieux de prendre acte et de chercher le prochain secteur d'avenir, de faire en sorte de se reconvertir. En somme, d'agir plutôt que de se lamenter. Evidemment, à court terme, il est certain que cette conversion est loin d'être facile. Des employés perdent leur poste et doivent se lancer dans des industries où ils n'ont pas la moindre qualification. Mais c'est la seule façon de se remettre en selle. Les droits de douane ne peuvent que prolonger inutilement l'agonie d'un secteur, et empêchent d'investir dans les secteurs de demain. Sans compter qu'ils sont, il ne faut pas l'oublier, totalement défavorables aux citoyens, qui se voient obligés d'acheter plus chers pour soutenir des industries paresseuses. J'ai vraiment apprécié, lors de ce meeting à Paris, de voir que je n'étais pas le seul à penser en ce sens. Suivez le lien pour vous inscrire au prochain événement, allez sur le site de l’agence séminaire à Paris, qui gère la chose.

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18Fév/16Off

De l’education pour simplifier la vie

La vie simple étant surtout le produit d'une direction d'esprit, il est naturel que l'éducation doit avoir une grande influence dans ce domaine. On ne pratique guère que deux manières d'élever les enfants; La première consiste à élever ses enfants pour soi-même; La deuxième consiste à les élever pour eux-mêmes. Dans le premier cas, l'enfant est considéré comme un complément des parents. Il fait partie de leur avoir et occupe une place parmi les objets qu'ils possèdent. Tantôt cette place est la plus noble: quand les parents apprécient surtout la vie d'affections. Tantôt aussi, lorsque les intérêts matériels dominent, l'enfant vient en second, en troisième, en dernier lieu. En aucun cas, il n'est quelqu'un. Jeune, il gravite autour des parents, non seulement par l'obéissance, ce qui est légitime, mais par la subordination de toutes ses initiatives et de tout son être. À mesure qu'il avance en âge, cette subordination s'accentue et devient de la confiscation en s'étendant aux idées, aux sentiments, à tout. Sa minorité se perpétue. Au lieu d'évoluer lentement vers l'indépendance, l'homme progresse dans l'esclavage. Il est ce qu'on lui permet d'être, ce que le commerce, l'industrie de son père, ou encore ce que les croyances religieuses, les opinions politiques, les goûts esthétiques de son père, exigent qu'il soit. Il pensera, parlera, agira, se mariera, ou augmentera sa famille, dans le sens et dans la limite de l'absolutisme paternel. Cet absolutisme familial peut être pratiqué par des gens qui n'ont aucune volonté; il suffit qu'ils soient convaincus que le bon ordre exige que l'enfant soit la chose des parents. À défaut d'énergie ils s'empareront de lui par d'autres moyens, par les soupirs, les supplications, ou par de basses séductions. S'ils ne peuvent l'enchaîner, ils l'englueront et le prendront au piège. Mais il vivra en eux, par eux, pour eux, ce qui est la seule chose admissible. Ce genre d'éducation n'est pas seulement pratiqué dans la famille mais aussi dans les grands organismes sociaux dont la fonction éducatrice principale consiste à mettre la main sur les nouveaux venus, afin de les enfermer de la façon la plus irrésistible dans les cadres existants. C'est la réduction, la trituration et l'absorption de l'individu dans un corps social, qu'il soit théocratique, communiste ou simplement bureaucratique et routinier. Vu du dehors, un pareil système semblerait être l'éducation simple par excellence. Ses procédés, en effet, sont absolument simplistes. Et si l'homme n'était pas quelqu'un, s'il n'était qu'un exemplaire de la race ce serait là l'éducation parfaite. De même que tous les animaux sauvages et tous les poissons et insectes du même genre et de la même espèce ont la même raie au même endroit, de même nous serions tous identiques, ayant mêmes goûts, même langue, même croyance et mêmes tendances. Mais l'homme n'est pas qu'un exemplaire de la race et c'est pour cela que ce genre d'éducation est loin d'être simple par ses effets. Les hommes varient tellement entre eux qu'il faut inventer des moyens innombrables pour réduire, endormir, éteindre la pensée individuelle. Et l'on n'y parvient qu'en partie, ce qui dérange tout perpétuellement. À chaque instant, par une fissure, la force intérieure d'initiative se fait jour avec violence et produit des explosions, des commotions, des désordres graves. Et là où rien ne se produit, où force reste à l'autorité extérieure, le mal gît au fond. Sous l'ordre apparent se cachent les révoltes sourdes, les tares contractées dans une existence anormale, l'apathie, la mort. Le système est mauvais qui produit des fruits semblables et, quelque simple qu'il paraisse, au fond il engendre toutes les complications.

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18Fév/16Off

Sacrifier pour innover ?

Joseph Schumpeter, sans doute le plus grand économiste du XXe siècle, nous tire en 1942 ce coup de bazooka entre les deux yeux: "le nouveau ne naît pas de l'ancien mais à côté de l'ancien et lui fait concurrence jusqu'à le tuer". L'idée fera date car ses implications sont d'une profondeur abyssale. Depuis les travaux d'après-guerre de Robert Solow, on sait que la croissance économique d'un pays sur le long terme ne peut provenir que du progrès technique, c'est-à-dire de l'innovation dans les entreprises. Mais attention, nous dit Schumpeter, l'innovation est une arme de destruction massive de tout ce qui est ancien. L'innovation n'ajoute pas, elle remplace. Dans ces conditions, la croissance n'est pas une mer joliment animée par un vent constant, mais un chaos dans lequel des forces se déchainent en tous sens et où, in fine, les anciens laissent la place aux jeunes. Si l'on relie les travaux de Schumpeter avec la pensée de l'historien Français Fernand Braudel, on comprend pourquoi le barycentre de "l'économie monde" se déplace à chaque nouvelle révolution industrielle. C'est parce que Schumpeter inclut aussi une composante géographique: de nouveaux lieux de production prennent la place d'anciens. Venise, Liverpool ou Detroit en savent quelque chose. Mais voilà que la théorie économique ne suffit plus et que nous devons faire appel à l'histoire et à la philosophie. Car pour nous, citoyens de la vieille Europe, la question incarnée est: pouvons-nous être un continent de croissance et d'innovation en conservant une part de notre passé? Pouvons-nous avancer par la réforme et non par la révolution? Pouvons-nous contourner la table rase de Descartes et Rabaud Saint-Etienne et son quasi-schumpétérien "Pour rendre le peuple heureux, il faut le renouveler, changer ses idées, changer ses lois, changer ses mœurs, changer les hommes, changer les choses, changer les mots... Tout détruire; oui tout détruire puisque tout est à récréer"? La réponse n'est certainement pas à chercher du côté de ceux qui veulent nous enfermer dans le présent ou tenter de nous faire remonter vers le passé. Ceux-là ont un programme certes cohérent mais réactionnaire: protectionnisme, hyper-réglementation, politiques industrielles étatiques, recentralisation, fin de l'immigration, sortie de l'Union Européenne... Ils nous promettent le déclin dans une plus grande égalité. Ils sont à prendre très au sérieux car les partis d'extrême-droite, qui incarnent politiquement ce courant, reçoivent dans le monde développé une audience inégalée de la part de populations déboussolées et qui se détournent des partis traditionnels qui ont souvent intellectuellement démissionné. Il semble que pour ceux qui se veulent progressistes et refusent tout à la fois le retour au passé et la révolution, la réponse se situe deux niveaux: celui des organisations et celui des valeurs. Les organisations d'abord. Contrairement à la règle édictée par Schumpeter, il est sans doute possible de faire passer les organisations existantes d'un cycle d'innovations à l'autre. Bien sûr, on voit bien que les importantes capitalisations boursières du moment (les GAFA, auxquelles on peut ajouter des sociétés comme Tesla ou Whatsapp) sont des entreprises récentes - (à l'exception notable d'Apple). Mais certains travaux économiques récents, comme ceux de Christopher Tonetti à Stanford, montrent que, du point de vue micro comme macroéconomique, l'imitation des jeunes entreprises qui innovent par les plus anciennes peut être une stratégie payante. Ainsi, il existe dans nos pays des gains de productivité latents énormes dans nos entreprises traditionnelles si elles sont capables de s'ouvrir sur le monde et sur les meilleures technologies étrangères pour les importer. Nos vieilles industries doivent se robotiser, nos vieux commerces doivent passer au multicanal, nos vieux artisans doivent utiliser des imprimantes 3D (y compris les artisans d'art), nos vieux hôpitaux doivent investir dans le séquençage du génome et la robotique... Certes nous ne serons pas les initiateurs de ces innovations mais après tout faisons fi de notre orgueil, l'important est qu'elles existent et que nous en profitions, fusse avec un peu de retard. Les valeurs ensuite. Le goût du progrès n'empêche pas un certain conservatisme. Un regard affectueux vers l'histoire, une solidarité publique prononcée, une extrême précaution quant au maniement des armes, le culte de la beauté des arts et des paysages: voilà ce qui caractérise l'Europe et, peut-être plus encore pour les deux premiers traits, la France, et qui explique la dépense publique élevée, la fiscalité lourde, un écologisme maladroit, la difficulté à intégrer dans notre économie des innovations aussi radicales que celles liées aux NBIC, la place de la réflexion sur l'éthique, parfois inhibitrice quand elle prend la forme extrême d'une principe de précaution constitutionnel appliqué avec zèle, mais aussi le refus absolu du port d'arme ou de la peine de mort... Ces valeurs-ci ne sont pas universelles, c'est pour cela qu'elles nous sont propres à la différence de l'humanisme ou de l'amour de la liberté dans leurs acceptions la plus large. Mais les valeurs européennes n'empêchent pas l'innovation Schumpétérienne si elles sont assumées et utilisées avec discernement. Britanniques, Suisses ou Suédois, si attachés à certaines de leurs traditions et en même temps si enclins à innover ne nous montrent-ils pas de ce point de vue un chemin fécond, un chemin tout européen?

8Fév/16Off

Fichu Martel

Quand je discute de l'actualité avec mon entourage, on me dit souvent de ne pas me mettre "Martel en tête". Mais c'est qui, ce Martel, au juste ?? Il paraît que je prends tout cela trop à coeur. Pourtant, quand on parle d'actualité, c'est de notre monde dont on parle. De son passé, de son présent, et de son avenir. Ce ne sont pas des sujets sur lesquels on peut faire l'impasse, des sujets qu'on peut prendre par-dessus la jambe. Alors c'est vrai que je réagis parfois de manière viscérale à l'actualité, et cela étonne les gens. Moi, ce qui m'étonne, c'est qu'ils puissent garder un tel calme face à la fureur du monde. Quel anesthésique utilisent-ils donc ?

J'ai donc fini par créer ce blog. Pour me mettre Martel en tête, justement. Parce qu'on ne peut pas passer son temps à regarder ailleurs, faire l'autruche, détourner les yeux de tout ce qui se passe. Martel n'a qu'à bien se tenir. Je ne vais pas le lâcher de sitôt ! Au fil de mes billets, nous allons essayer de découvrir qui est ce fameux Martel. Pour découvrir qu'en réalité, ils sont une multitude. Chaque politicien, chaque journaliste, chaque économiste passant sur un plateau télé est un Martel qui s'ignore, dont il importe d'étudier les discours, mais surtout les non-dits. Car tout comme les spectateurs, eux aussi savent regarder ailleurs, faire l'autruche, et détourner les yeux de tout ce qui se passe. Et il y a fort à parier que nous le payions cher à l'avenir. Très cher. Foutus Martels !