Martel en tete

1Sep/16Off

La notion de devoir

Lorsqu'un dommage est causé, qui doit le réparer?—Celui qui l'a fait. Cela est juste, mais cela n'est que théorie. Et la conséquence de cette théorie serait qu'il faudrait laisser subsister le mal jusqu'à ce que les malfaiteurs soient trouvés et l'aient réparé. Mais si on ne les trouve pas? Ou s'ils ne peuvent ni ne veulent réparer? Il pleut sur vos têtes par une tuile brisée, ou le vent pénètre chez vous par un carreau cassé. Attendrez-vous pour chercher le couvreur et le vitrier que vous ayez fait arrêter le casseur de tuile ou de carreau? Vous trouveriez cela absurde, n'est-ce pas? C'est pourtant une bien ordinaire pratique. Les enfants s'écrient avec indignation: «Ce n'est pas moi qui ai jeté cet objet, ce n'est pas moi qui le ramasserai!» Et la plupart des hommes raisonnent de même. C'est logique. Mais ce n'est pas cette logique-là qui fait marcher le monde. Ce qu'il faut au contraire savoir et ce que la vie vous répète tous les jours c'est que le dommage causé par les uns est réparé par les autres. Les uns détruisent, les autres édifient; les uns salissent, les autres nettoient; les uns attisent les querelles, les autres les apaisent; les uns font couler les larmes, les autres consolent; les uns vivent pour l'iniquité, les autres meurent pour la justice. Et c'est dans l'accomplissement de cette loi douloureuse qu'est le salut. Cela aussi est logique, mais de cette logique des faits qui fait pâlir celle des théories. La conclusion à tirer n'est pas douteuse. Un homme au cœur simple la tire ainsi: étant donné le mal, la grande affaire est de le réparer et de s'y mettre sur-le-champ; tant mieux si messieurs les malfaiteurs veulent bien contribuer à la réparation: mais l'expérience nous déconseille de trop compter sur leur concours.

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